Seconde Guerre mondial

Seconde Guerre mondial

Histoire de la Shoah 5 partie

Les sauvetages collectifs : Bulgarie et Danemark

 

En Bulgarie en mars 1943, un vaste mouvement d'opinion oblige le roi et le Parlement à reculer et à refuser de livrer les Juifs nationaux aux nazis. Malgré la présence de la Wehrmacht sur le sol de son allié, la communauté bulgare survit intégralement à la guerre. En revanche, Sofia accepte d’arrêter et de déporter plus de 13 000 Juifs de la Thrace et de la Macédoine occupés par ses troupes.

 

 

 

Au Danemark, le roi Christian X menace de porter lui-même l'étoile jaune si les Allemands cherchent à l'imposer. En septembre 1943, lorsqu'une indiscrétion volontaire d'un diplomate allemand fait connaître le projet de déportation des quelques 7 000 Juifs, la population se mobilise pour faire passer la communauté en Suède neutre à travers le détroit de Copenhague. En plusieurs nuits, avec la bienveillance de la police et de l'administration, une flottille de petits navires conduit à bon port ceux qu'une chaîne de complicités a permis d'acheminer en cachette jusqu’aux quais.

 

 

Des alliés d’Hitler entre compromissions et réticences

 

La Finlande, suite au scandale dans l'opinion, n'a finalement livré que 9 des 34 Juifs étrangers prévus, mais un seul de ces neuf survivra.

 

 

Les Japonais, qui se sont illustrés par d'innombrables crimes de guerre en Asie, ne donnent pas suite pour autant aux demandes de leur allié Hitler de s'en prendre aux 20 000 Juifs allemands réfugiés à Shanghai après 1933. L'antisémitisme idéologique des nazis leur reste incompréhensible, et par le plan Fugu, ils tentent au contraire d'utiliser ces réfugiés souvent hautement qualifiés pour mettre en valeur la Mandchourie occupée.

 

 

 

 

D’autres alliés de Hitler se sont arrêtés à mi-chemin dans leur participation active à la Shoah. En Hongrie, bien que soumis à une législation antisémite depuis l'entre-deux-guerres, les Juifs hongrois ne sont pas livrés à la déportation tant que la Wehrmacht n’envahit pas le pays en mars 1944. L’amiral Horthy s’oppose à nouveau aux déportations, qui sont suspendues en juillet, mais elles reprennent à l’automne quand il est évincé par les nazis au profit des collaborationnistes fascistes, les Croix fléchées. La Roumanie, qui a massacré plus de 200 000 Juifs hors de ses frontières, a refusé de livrer ses Juifs nationaux, qui ont survécu.

 

État antisémite, la Slovaquie de Mgr Tiso, satellite du Reich, a d'abord livré par dizaines de milliers ses ressortissants Juifs au début de l'année 1942, avant de se raviser, notamment sous la pression du Vatican, et de suspendre les déportations. Après l’écrasement du soulèvement national slovaque d’août 1944, les nazis et les collaborationnistes reprennent les déportations racistes.

 

 

Camp d'internement pour Juifs italiens à Fossoli, une des antichambres d'Auschwitz

 

 

 

L'Italie fasciste de Mussolini se voit généralement gratifiée d'avoir protégé les Juifs dans ses zones d'occupation. Ainsi, dans les sept départements français occupés par l'armée italienne entre novembre 1942 et le 8 septembre 1943, l'administration militaire a refusé toute déportation et n'a pas hésité à rappeler à l'ordre les autorités du régime de Vichy quand elles s'en prenaient à des Israélites. De ce fait, de nombreux Juifs de France affluent dans la zone italienne, où les rafles et les déportations commencent en revanche à leur tour dès l’arrivée des Allemands.

 

 

Toutefois, l'historiographie récente a nuancé fortement cette représentation d'un fascisme protecteur des Juifs. Ainsi qu'elle l'a démontré, Mussolini était devenu personnellement raciste et antisémite au moment de la conquête de l'Éthiopie (1935-1936) puis avec la radicalisation de son régime dans un sens totalitaire, à la fin des années 1930. De ce fait, les lois antijuives adoptées en Italie en 1938 ne doivent rien à une volonté d'imiter son allié Hitler, et répondent à une conversion réelle du régime à l'antisémitisme. Plus appliquées que ce que l'on a longtemps cru, elles ont fragilisé les Juifs italiens et préparé en partie le terrain aux Allemands. Elles étaient d’autant plus graves que l’Italie n’avait pas de tradition antisémite et que les Juifs étaient traditionnellement nombreux et bien acceptés dans l’armée, dans l’administration ou dans le mouvement fasciste lui-même.

 

D'autre part, le refus des Italiens de livrer les Juifs doit beaucoup plus à une volonté de se saisir de l'occasion pour montrer aux Allemands qu'ils étaient les maîtres dans leurs zones eux qu'à une quelconque sympathie pour les Juifs, selon les historiens actuels. Aucune instruction de protéger les Juifs ne fut jamais donnée par le gouvernement de Rome, et il arriva même que les troupes italiennes livrent en certains endroits des Juifs aux nazis, ainsi lors de la déportation des Juifs des Juifs de Tirana en Albanie.

 

 

Après l'invasion de l'Italie en septembre 1943, les très violentes milices fascistes de la République de Salo collaborent activement à la traque et à l'assassinat des Juifs. Près de 9 000 Juifs italiens ont été déportés.

 

 

Dévouements individuels et organisés

 

Décerné par Yad Vashem, le titre de « Juste parmi les nations » honore les non-Juifs qui ont sauvé des Juifs de la Shoah pour des motifs désintéressés.

 

Un des nombreux passeports suédois délivrés par Raoul Wallenberg à des Juifs de Budapest en 1944

 

Ne sont donc pas abordés ici ceux qui ont vendu des faux papiers aux Juifs parfois à prix d’or, ou qui en ont fait passer en Espagne ou en Suisse contre de l’argent - certains passeurs peu scrupuleux vendaient même leurs clients aux nazis après avoir touché la somme due ; la plupart des passeurs, bénévoles et courageux, ont offert leur aide au risque de leur vie ou de leur liberté.

 

 

 

À Marseille, l'Américain Varian Fry parvient en 1940 à faire sortir plus de 2 000 intellectuels et artistes d'Europe dont de nombreux Juifs. En 1944 à Budapest, le diplomate suédois Raoul Wallenberg sauve plus de 20 000 israélites hongrois, notamment en distribuant des passeports de complaisance.

 

 

 

Les institutions religieuses sont sur-représentées dans l’aide aux Juifs, souvent dissimulés dans des couvents ou des pensionnats religieux. Des faux certificats de baptême ont été délivrés par d’innombrables curés et pasteurs. Malgré leurs sympathies pétainistes, un grand nombre d’évêques français ont fait donner asile à des Juifs. À Rome, le silence officiel du pape Pie XII n’empêcha nullement les institutions religieuses liées au Vatican d’abriter et de sauver des milliers de pourchassés. D’autres organisations d’inspiration religieuse étaient plus proches de la Résistance spirituelle. Ainsi de nombreux enfants raflés à Lyon ont-ils été sortis en une nuit du camp de Villeurbanne (28 août 1942) par l’Amitié chrétienne de l’abbé Glasberg et du R.P. Pierre Chaillet, fondateur de Témoignage chrétien.

 

 

Une rescapée de la Shoah montre le nom du Juste qui l'a sauvée, Yad Vashem, Jérusalem.

 

Des villages entiers sont parfois venus au secours des persécutés, comme les villages protestants de Nieuwlande en Hollande, de Dieulefit dans la Drôme et du Chambon-sur-Lignon en Haute-Loire, ce dernier étant collectivement reconnu comme Juste. Minorité jadis persécutée par le pouvoir royal, les protestants français ont été particulièrement nombreux à se dévouer aux nouveaux proscrits.

 

 

 

Des fonctionnaires, des policiers, des soldats, des entreprises ont refusé de participer à la persécution, à la spoliation ou à la déportation. Quelques policiers échappés de la préfecture où ils étaient consignés réussissent à avertir et sauver des Juifs parisiens à la veille de la rafle du Vel’ d’Hiv’. Des responsables de la préfecture, le 18 juillet 1942, ont sauvé la quasi-totalité des centaines de Juifs visés par la rafle manquée de Nancy. Oskar Schindler, employeur allemand de main-d’œuvre forcée juive à Cracovie, sauve 1 200 d’entre eux de la mort lorsqu’il comprend le sort qui leur est réservé.

 

Surtout à l’Ouest, beaucoup d’Européens sont venus en aide aux Juifs comme à une catégorie de parias parmi d’autres, sans avoir conscience eux-mêmes du sort spécifique qui les attendait par rapport aux prisonniers évadés, aux résistants ou aux réfractaires au STO. Même lorsqu’ils sauvaient des gens de l’extermination, peu d’individus et de mouvements ont été à l’époque particulièrement consciente des projets réels d’Hitler et de la centralité du racisme et de l’antisémitisme dans l’idéologie nazie.

 

 

La Shoah est, entre autres, un anéantissement culturel. Le yiddishland d'Europe centrale et orientale a pratiquement disparu, et l'on estime que les trois quarts des locuteurs du yiddish ont disparu pendant la guerre.

 

 

 

La France a perdu le quart de sa population juive, même si le monde israélite français en tant que tel continue d'exister (des synagogues et des écoles juives sont même restées ouvertes à Paris toute l'Occupation), en revanche, les communautés juives d'Amsterdam, Berlin, Vienne, Budapest ou Vilnius ont été éradiquées à plus de 80 ou 90 %. À Vilnius, ce sont 32 000 Juifs qui sont assassinés lors des pogroms du début du conflit. Les nazis ont aussi cherché à effacer toute trace du passé juif multiséculaire en spoliant leurs victimes de tous leurs biens et œuvres d'art, en détruisant les synagogues, en brûlant des livres de prières, en retournant les cimetières.

 

 

Ce n'est pas le peuple juif qui a perdu un grand nombre de ses enfants, mais les rares survivants qui ont perdu leur peuple et leur univers, sans retour possible. Marek Edelman, un des rares chefs survivants du soulèvement du ghetto de Varsovie, déclarera ainsi devant la destruction de 97 % de la communauté polonaise : « Dans le monde, il n'y a plus de Juifs. Ce peuple n'existe pas. Et il n'y en aura pas.

 

 

Bilans chiffrés des victimes

 

 

Les estimations du nombre de Juifs tués lors de l'Holocauste varient pour les spécialistes entre 5,1 millions (l'historien Raul Hilberg) et 6 millions (l'économiste et statisticien Jacob Lestchinsky). On parle de 6 millions de victimes en référence au chiffre cité dès le procès de Nuremberg, justifié dans Le Bréviaire de la Haine de Léon Poliakov et repris au procès d'Adolf Eichmann. Le Yad Vashem a pu retrouver le nom d'un peu plus de 4 millions d'entre elles, selon ses propres estimations.

 

 

L'Europe du génocide.

 

À la fin de son ouvrage La Destruction des Juifs d'Europe, Raul Hilberg tente de chiffrer globalement les victimes. Il répartit les chiffres en trois catégories :

Morts consécutives aux privations, en particulier, la faim et la maladie dans les ghettos.

Morts par fusillades.

Morts consécutives aux déportations vers les camps d'extermination.

 

Les estimations proviennent de rapports émanant notamment des services allemands, des autorités satellites et des conseils juifs. Ils ont ensuite été affinés grâce aux comparaisons entre les statistiques d'avant-guerre et celles d'après-guerre. Hilberg s'efforce de faire des corrections pour ne prendre en compte que les Juifs victimes de la Shoah et écarter ceux dont la mort peut être imputée à la guerre.

 

Cette dissociation est souvent délicate. Ainsi, lorsque l'Allemagne envahit l'URSS, un million et demie de Juifs quittent leur domicile, au même titre qu'un nombre plus important de non-juifs parmi lesquels la mortalité est supérieure à la normale. Un autre problème dans l'estimation du nombre de victimes tient au fait que 70 % des victimes proviennent de la Pologne et de l'URSS et que les frontières de ces deux pays ne cessent d'évoluer tout au long de la guerre si bien que les statistiques de la bureaucratie nazie se réfèrent souvent à des territoires dont les frontières sont mouvantes.

 

En résumé, l'ampleur du génocide lui-même, les circonstances de la persécution et de la guerre, l'ambiguïté même de la qualité de Juif rendent impossible de chiffrer précisément le nombre de victimes, encore moins de les catégoriser : Hilberg donne finalement l'estimation de 5,1 millions de victimes juives.

 

Les victimes par pays

D’après Raul Hilberg dans Selon les frontières d’avant guerre. Les quelques pourcentages indique sont tirés du site du CCL.

 

 

 

La proportion des morts de l'Holocauste sur l'ensemble des crimes nazis.

 

 

 

 

Pologne :                    plus de 3 000 000 (8 % de survivants)       Lettonie : 70 000

 

URSS :                       plus de 700 000                                            Yougoslavie : 60 000

 

Roumanie :                270 000                                                          Grèce : 60 000

 

Tchécoslovaquie :     260 000                                                          Autriche : plus de 50 000

 

Hongrie :                   plus de 180 000                                             Belgique : 24 000

 

Lituanie :                   jusqu'à 130 000                                         Italie (Rhodes comprise) : 9 000

 

 

 Allemagne :              130 000                                                          Estonie : 1 000

 

Pays-Bas :                  plus de 100 000 (25 % de survivants)         Norvège : moins de 1 000

 

France :                     75 000                                                            Luxembourg : moins de 1 000

 

Ville libre de Dantzig : moins de 1 000

 Total : Environ 5 122 000 Le tableau se réfère aux frontières de 1937. Les Juifs convertis au christianisme sont compris dans ces chiffres et les réfugiés sont comptés dans les pays à partir desquels ils ont été déportés.

 

Selon Jacob Robinson :

Pologne et URSS :                4 565 000

Allemagne :                           125 000

Autriche :                             65 000

Tchécoslovaquie (dans les frontières de 1937) :    277 000

Hongrie (dans les frontières de 1942) :                  402 000

France :                                 83 000

Belgique :                              24 000

Luxembourg :                           700

Italie :                                    7 500

Pays-Bas :                             106 000

Norvège :                                  760

Roumanie :                           40 000

Yougoslavie :                        60 000

Grèce :                                   65 000

Total :                                    5 820 960

 

 

Charnier de Bergen-Belsen, avril 1945.

 

Les victimes françaises

Selon des chiffres établis par l'association des Fils et filles de déportés juifs de France présidée par Serge Klarsfeld et publiés en 1985

75 721 Juifs, dont près de 11 000 enfants, ont été déportés de France de mars 1942 à août 1944, la plupart vers le camp d'Auschwitz.

 

74 convois au total sont partis en direction des camps de concentration ou d'extermination, le premier de Compiègne le 27 mars 1942 et le dernier de Clermont-Ferrand le 18 août 1944.

Près de 90 % de ces 76 000 Juifs ont été déportés de France vers Auschwitz. Les 43 convois déportés en 1942, l'ont été en direction d'Auschwitz-Birkenau. En 1943, sur 17 convois de déportés, 13 étaient à destination d'Auschwitz et 4 de Sobibor. En 1944, les 14 convois étaient aussi à destination d'Auschwitz, sauf un parti pour Kaunas et Reval

2 566 survivants étaient comptabilisés à la Libération en 1945, soit environ 3 % des déportés.

Avec les 3 000 morts dans les camps d'internement avant la déportation et le millier d'exécutions de Juifs, le bilan de la « solution finale » en France a atteint 80 000 victimes.

Les nationalités les plus touchées parmi les Juifs déportés de France ont été les Polonais (environ 26 000), les Français (24 000 dont plus de 7 000 sont des enfants nés en France de parents étrangers), les Allemands (7 000), les Russes (4 500), les Roumains (3 300), les Autrichiens (2 500), les Grecs (1 500), les Turcs (1 300), les Hongrois (1 200).

Au moins 85 % des Juifs déportés de France ont été arrêtés par les forces de police françaises.

 

Conséquences et mémoire de la Shoah

L’importance centrale de la Shoah dans la mémoire occidentale ne fut acquise qu’à partir de sa redécouverte dans les années 1970, et d’une meilleure compréhension de sa spécificité.

À l’heure actuelle, comme le note l’historien Tony Judt, la Shoah est devenue une pierre angulaire de l’identité européenne :  nier ou rabaisser la Shoah, c’est s’exclure soi-même du champ du discours public civilisé. Sa mémoire est devenue la définition et la garantie même de l’humanité restaurée du continent. 

 

Réparations morales et reconnaissance du passé

Les pays communistes refusèrent longtemps toute indemnisation des victimes juives, gommèrent l’identité juive des victimes du nazisme et n’admirent aucunement la responsabilité de leurs États dans les crimes passés. La RDA rejeta ainsi la responsabilité du crime sur les capitalistes ouest-allemands, et ne reconnut la responsabilité du peuple allemand dans la Shoah qu’après les premières élections libres de 1990, à la veille de disparaître.

 

Après-guerre, le procureur de Hesse Fritz Bauer ne fut pas avare de ses efforts afin d'obtenir justice et compensations aux victimes du régime nazi. En 1958, il réussit à obtenir qu'un procès en action collective certifié ait lieu; le recueil des nombreuses réclamations individuelles de victimes aboutira aux procès dits “d'Auschwitz” de Francfort, dont la procédure débuta en 1963.

 

Bauer fonda également, avec Gerhard Szczesny, le Syndicat Humaniste, une organisation des droits de l'Homme, en 1961. Après la mort de Bauer, l'Union fit un don pour financer le Prix Fritz Bauer. De plus, l'Institut Fritz Bauer, fut fondé en 1995, une organisation à but non lucratif consacrée aux droits civils, qui se concentre sur l'histoire et les conséquences de l'Holocauste.

En 1970, le chancelier ouest-allemand Willy Brandt s’agenouilla spectaculairement devant le monument à la mémoire du ghetto de Varsovie.

En 1995, lors d'un voyage en Israël, la reine Beatrix des Pays-Bas évoqua publiquement le sort des Juifs du pays, exterminés à 80 %. L'État avait attendu 1972 pour accepter de verser une indemnité aux rescapés.

En juillet 1995, le président Jacques Chirac reconnut la responsabilité de l’État français dans la rafle du Vel’ d’Hiv’ et la déportation des Juifs, évoquant la « dette imprescriptible » à leur égard.

 

Dès sa première élection en 1990, le président polonais Lech Wałęsa s'est rendu en Israël pour dénoncer devant la Knesset l'antisémitisme passé et présent en Pologne, message confirmé en juillet 1991 pour l'anniversaire du pogrome de Kielce (juillet 1946). Néanmoins, il ne prononce pas une seule fois le mot « juif » lors de son discours au 50e anniversaire de la libération d’Auschwitz en 1995. Son successeur Aleksander Kwaśniewski a prononcé en juillet 2001 un discours solennel à l'occasion de l'anniversaire du massacre, à Jedwabne en 1941, d'un millier de Juifs par leurs voisins polonais, et a reconnu la responsabilité des Polonais dans ce crime et fait acte de repentance. Ces prises de position font suite à d'intenses débats publics dans le pays, notamment à propos du pogrome de Jedwabneau développement de la recherche historique et des actions associatives et éducatives depuis l'avènement de la démocratie.

En 2005, à la veille de l’entrée de son pays dans l’union européenne, le président Ion Iliescu reconnaît que la Roumanie a participé à la Shoah.

 

Le rapprochement judéo-chrétien conduit depuis l'entre-deux-guerres et relancé par le concile de Vatican II (1962-1965) (où la Shoah, encore peu redécouverte en Europe, n'a pas été évoquée) a parfois butté sur la question de l'attitude de la Papauté et d'une partie du clergé et des fidèles pendant le génocide. L'installation du carmel d'Auschwitz dans l'enceinte du camp, dans les années 1980, a provoqué une controverse longue de dix ans, les organisations juives dénonçant une tentative de gommer la spécificité juive du lieu au profit d'une « christianisation » et d'une récupération de la Shoah. Jean-Paul II, ancien archevêque de Cracovie et qui s'est rendu plusieurs fois à Auschwitz, mit fin à la polémique en 1993 en ordonnant le départ des carmélites.

En septembre 1997, l'épiscopat français publiait à Drancy une déclaration de repentance pour les réactions insuffisantes de l'Église de France pendant la persécution raciale. En 1998, après plus de dix ans de travaux d'une commission d'historiens et d'hommes d'Église, la publication par le Vatican du document Souvenons-nous : une réflexion sur la Shoah n'apporta pas pleine satisfaction aux représentants juifs. Toutefois, la condamnation répétée de l'antisémitisme par Rome et par les Églises nationales (y compris polonaise), les demandes de pardon pour le long antijudaïsme du passé et les voyages de Jean-Paul II et Benoît XVI à Auschwitz ont démontré la rupture officielle de l'Église avec toute tentation antisémite.

 

En mars 2008, la chancelière allemande Angela Merkel a évoqué la Shoah dans un discours devant la Knesset. « Nous autres, Allemands, la Shoah nous emplit de honte. Je m’incline devant ses victimes, ses survivants et ceux qui les ont aidés.

 

Réparations financières et restitutions des biens volés

 

Chaussures récupérées par les nazis sur les déportés gazés, Maidanek.

 

Dès l'après-guerre, une partie des biens volés aux Juifs ont pu être restitués. Mais c'est dans les années 1990 que l'aryanisation a commencé à faire l'objet d'études historiques spécifiques et d'enquêtes publiques approfondies, ainsi avec la mission Mattéoli mise en place en 1997 par le gouvernement français.

En 1953, un traité signé entre la RFA et Israël prévoie le versement par Bonn d'une importante indemnité. Il est ratifié malgré l'opposition d'une partie de la classe politique allemande et de certains Israéliens choqués que Ben Gourion ait négociés directement avec les Allemands et Adenauer. Le traité sera scrupuleusement appliqué, avec 845 millions de dollars versés en 1965, 5 000 employés fédéraux occupés à traiter 4 276 000 demandes. En 1973, le travail est considéré comme achevé à 95 %. Les réparations ont occupé jusqu'à 5 % du budget fédéral de l'Allemagne de l'Ouest. À la fin des années 1980, près de 30 milliards de dollars d'indemnisations ont été versés, ce qui était conforme et même supérieur aux attentes des signataires du texte de 1953.

 

Les industries qui avaient exploité la main-d'œuvre concentrationnaire juive ont refusé après-guerre de reconnaître la moindre responsabilité morale et de verser la moindre indemnité. Selon Paul Johnston, les grandes entreprises allemandes « ont résisté pied à pied à toute demande d’indemnisation dans un étonnant mélange de mesquinerie et d’arrogance ». 13 millions de dollars avaient été versés au milieu des années 1980 à moins de 15 000 Juifs rescapés (les anciens esclaves d'IG Farben touchant 1 700 $ chacun, ceux d'AEG Telefunken 500 $, d'autres encore moins) et rien n'avait été versé aux familles de ceux morts d’épuisement. Ce n'est qu'en 1999 qu'un fonds de compensation sera mis en place en Allemagne et en Autriche pour les anciens travailleurs forcés juifs des camps de la mort et des camps de travail, voire pour une partie des travailleurs civils amenés de force en Allemagne.

 

Les États communistes refuseront de reconnaître la moindre responsabilité dans un crime attribué au capitalisme occidental, et a fortiori de verser la moindre indemnité jusqu'à leur disparition. L'Autriche, dont les foules avaient réservé un accueil triomphal à Hitler en 1938 et qui a fourni de loin la plus forte proportion de militants du NSDAP et de tueurs de la Shoah, se présentera comme « première victime du nazisme » et refusera durablement toute reconnaissance morale et financière.

 

 

L'une des chambres à gaz d'origine, intacte, à Maidanek.

 

La conférence d'Evian

Entre 1933 et 1941, les nazis cherchèrent à créer une Allemagne "judenrein" (nettoyée des Juifs) en rendant la vie si difficile aux quelque 600 000 Juifs allemands qu'ils seraient contraints de quitter le pays. En 1938, environ 150 000 Juifs allemands, c'est-à-dire un quart, étaient déjà partis. Après l'annexion allemande de l'Autriche en mars 1938, 185 000 Juifs supplémentaires se retrouvèrent sous le joug nazi. De nombreux Juifs allemands et autrichiens qui souhaitaient partir ne parvinrent pas à trouver un pays d'accueil. Un pourcentage important d'entre eux essaya d'émigrer aux Etats-Unis mais ne put pas obtenir les indispensables visas d'entrée. Le Congrès américain avait fixé en 1924 des quotas d'immigration qui limitaient le nombre d'immigrants et établissait une discrimination à l'égard de groupes qui étaient considérés comme indésirables pour des raisons raciales et ethniques.

Le président Franklin D. Roosevelt, réagissant à une pression politique grandissante, demanda la convocation d'une conférence internationale pour faciliter l'émigration des réfugiés d'Allemagne et d'Autriche, et pour mettre sur pied une organisation internationale en vue de travailler à une solution globale du problème des réfugiés. Au début du mois de juillet 1938, les délégués de 32 pays se réunirent en France, à Evian, sur les bords du lac de Genève. Roosevelt choisit Myron C. Taylor, homme d'affaires et ami proche, pour représenter les Etats-Unis à la conférence. Pendant cette réunion de neuf jours, les délégués exprimèrent les uns après les autres leur sympathie envers les réfugiés. Mais la plupart des pays, y compris les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, invoquèrent diverses raisons pour ne pas laisser entrer chez eux un plus grand nombre de réfugiés. Seule la République Dominicaine accepta de recevoir des réfugiés supplémentaires.

 

Les participants à cette conférence créèrent le Comité intergouvernemental sur les réfugiés (Intergovernmental Committee on Refugees : ICR), chargé d'approcher "les gouvernements des pays d'accueil en vue de développer les opportunités d'installation définitive" et de chercher à persuader l'Allemagne de coopérer en créant "les conditions d'une émigration dans l'ordre". L'ICR se vit accorder des pouvoirs limités et presque aucunes ressources financières, ni d'autre soutien de la part de ses pays membres. Ses résultats étaient limités jusqu'en septembre 1939, lorsque le début de la Seconde Guerre mondiale mit fin à tous les efforts.

A propos de la Conférence d'Evian, le gouvernement allemand déclara que l'on pouvait trouver "étonnant" que les pays étrangers osent critiquer l'Allemagne pour le traitement imposé aux Juifs, alors qu'aucun de ces pays n'acceptait de leur ouvrir ses portes. Bien que les événements des violents

Des préjugés raciaux largement répandus chez les Américains --y compris l'attitude antisémite de certains fonctionnaires du Département d'Etat-- jouèrent un certain rôle dans l'échec de l'accueil d'un plus grand nombre de réfugiés. Alors que leur pays n'avait pas encore surmonté la Grande dépression, de nombreux Américains croyaient également que les réfugiés leur disputeraient les emplois, et surchargeraient les programmes sociaux mis en place pour venir en aide aux nécessiteux.

 

 pogroms de la "Nuit de cristal" (Kristallnacht) de novembre 1938 aient largement fait l'objet de comptes-rendus illustrés et détaillés, les Américains restèrent peu enclins à accueillir des réfugiés juifs et les faibles quotas restèrent en place. Même les efforts de certains Américains pour secourir des enfants échouèrent : en 1939 puis en 1940 la Proposition de loi Wagner-Rogers, un effort pour permettre l'admission de 20 000 enfants réfugiés juifs, ne bénéficia pas du soutien du Sénat.

 

 

Photo prise au cours de la Conférence d’Evian sur les réfugiés juifs. A l’extrême droite se trouvent deux des délégués américains : Myron Taylor et James McDonald du Comité consultatif présidentiel pour les réfugiés politiques. Evian-les-Bains, France, juillet 1938.

 

 

Délégués à la Conférence d’Evian, où le sort des réfugiés juifs de l’Allemagne nazie fut discuté. Le délégué américain Myron Taylor est le troisième à partir de la gauche. France, juillet 1938.

 

La Conférence d’Evian sur les réfugiés juifs. De gauche à droite, le délégué français Henri Berenger, le délégué américain Myron Taylor et le délégué britannique Lord Winterton. France, 8 juillet 1938.

 

 

Le dirigeant sioniste britannique Norman Bentwich (à gauche) avec Henri Berenger, délégué français à la Conférence d’Evian sur les réfugiés juifs. Evian-les-Bains, France, juillet 1938.

 

 

Myron Taylor, délégué américain à la Conférence d’Evian, plaide pour la création d’un comité intergouvernemental pour faciliter l’émigration juive. Evian-les-Bains, France, 15 juillet 1938.

 

Le délégué américain Myron Taylor prononçant un discours à la Conférence d’Evian sur les réfugiés juifs d’Allemagne nazie. Evian-les-Bains, France, 15 juillet 1938.

 

 

L’Hôtel Royal, site de la Conférence d’Evian sur les réfugiés juifs d’Allemagne nazie. Evian-les-Bains, France, juillet 1938.

 

Les textes et photos proviennent de sites Internet, livres, et de revues.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 



07/07/2012
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